28.06.2010 - CESP
AISG, interview du Secrétaire Général du CESP

Le Conseil européen des syndicats de police élabore une base de données sur les conditions de travail des policiers (Gérard Greneron,
Obtenir des avancées en matière de protection sociale pour le policier et promouvoir les droits de l'homme. Ce sont les deux objectifs du CESP (Conseil européen des syndicats de police) qu'expose son secrétaire général, le Français Gérard Greneron, dans un entretien à AISG. Secrétaire général depuis 1998, et membre du bureau national du Snop, il explique le fonctionnement du CESP et ses activités, qui se déroulent essentiellement dans le cadre du Conseil de l'Europe. Il annonce que l'organisation finalise en ce moment une base de données sur les conditions de travail des policiers issus des pays représentés en son sein. Le CESP rassemble aujourd'hui 19 organisations représentant 300 000 policiers dans 18 pays d'Europe.
AISG : Qu'est ce que le CESP (Conseil européen des syndicats de police) ?
Gérard Greneron : Créé en 1988 à Avila, le CESP est une OING (Organisation internationale non gouvernementale) reconnue par le Conseil de l'Europe depuis 1991. Cette naissance visait à constituer un espace syndical européen des polices et a pris un sens supplémentaire avec la chute du mur de Berlin. Mes prédécesseurs ont rencontré des gens qui avaient soif de rendre leur police démocratique, de transformer une police politique en une police au service des citoyens. Le CESP rassemble aujourd'hui 19 organisations représentant 300 000 policiers dans 18 pays d'Europe. Nous cohabitons aujourd'hui avec un autre regroupement de syndicats fédérés au sein d'Eurocop. Nous nous en différencions par notre approche « sociale » des problèmes - le CESP a pour objectif d'obtenir des avancées en matière de protection sociale et juridique pour le policier - et par notre volonté de promouvoir les droits de l'homme.
AISG : Comment agit et comment fonctionne le CESP?
Gérard Greneron : Le CESP bénéficie du statut participatif, c'est-à-dire qu'il prend part aux commissions et groupes de travail mis sur pied par la Conférence des OING en relation avec les directions du Conseil de l'Europe, l'Assemblée parlementaire et le Congrès. Il est par ailleurs inscrit sur la liste des organisations internationales non gouvernementales habilitées à déposer des réclamations collectives contre la mauvaise application par les États de leurs engagements liés à la signature de la charte sociale européenne. Le CESP a déjà introduit sept réclamations dont deux sont en cours contre la France et une contre le Portugal.
En interne nous avons calqué son organisation sur celle du Conseil de l'Europe. Chaque organisation syndicale membre dispose d'une voix. A noter qu'un syndicat appartenant au CESP peut s'opposer à l'entrée d'un autre syndicat. Il s'agit ainsi d'éviter de reproduire au plan européen des dissensions nationales, qui pourraient conduire à des blocages. Nous avons déjà vécu une telle situation avant d'instaurer cette règle en 2002 : deux organisations portugaises, l'une représentant les forces dépendant du ministère de la sécurité intérieure, l'autre celles relevant du ministère de la Justice n'arrivaient pas à se mettre d'accord pour prendre des positions communes.
AISG : Quels travaux mène en ce moment le CESP ?
Gérard Greneron : Nous finalisons cette année une base de données permettant de comparer les statuts, les traitements, les primes et les avantages sociaux des policiers des pays représentés en notre sein. Personne n'a jamais réalisé un tel travail jusqu'ici. En outre, lors de la dernière réunion du CESP qui s'est déroulée les 16 et 17 juin à Kranjska Gora (Slovénie) 80 policiers dirigeants syndicaux de 18 pays se sont réunis pour évoquer l'hypothèse du prolongement d'activité des policiers au regard des modifications de l'âge de départ en retraite qui a été décidé ou est en cours dans les pays européens. L'idée principale de cette discussion sera de déterminer selon les syndicats de police jusqu'à quel âge il est raisonnable d'envisager la présence des policiers sur des missions de voie publique et s'il faut envisager une affectation différente en fonction de l'âge du policier.
AISG : Comment a été perçue la participation d'une organisation policière aux travaux du Conseil de l'Europe chargé de veiller sur le respect des droits de l'homme ?
Gérard Greneron : C'est sous la présidence de Michel Albin, à partir de 1999, que le CESP s'est encore plus impliqué au sein de la conférence des OING. Nous avons fait beaucoup d'efforts pour introduire le CESP dans cette structure dont je suis le vice-président depuis 2006. Nous avons dû faire un peu le forcing au départ, puis nous avons su démontrer que les policiers étaient des gens fréquentables. Nous avons notamment participé à un groupe de travail informel sur la police et les droits de l'homme entre 1997 et 2000. Cette initiative a rassemblé des policiers, des gendarmes, des gouvernements et des ONG et a débouché sur la rédaction d'un guide, mis à disposition des polices de tous les pays membres du Conseil de l'Europe.
Plus récemment, nous avons aussi été désignés comme expert par le Commissaire aux droits de l'homme lorsqu'il a conduit des réflexions sur la composition des commissions chargées d'étudier les plaintes contre les forces de sécurité dans les différents pays. À cette occasion j'ai plaidé pour que des représentants de la police siège dans ce type d'instance, comme c'est le cas en France au sein de la CNDS. Un rapport sur le sujet devrait être finalisé d'ici l'été.
AISG : Pourquoi ne travaillez vous pas davantage avec la commission européenne ?
Gérard Greneron : La commission européenne travaille peu dans le domaine des droits de l'homme. Nous avons rencontré par le passé les commissaires chargés de la sécurité intérieure, mais nous ne les avons pas sentis intéressés par nos avis. Nous suivons donc les initiatives de l'UE sans être proactifs car il nous est difficile d'établir des relations suivies.
AISG : Comment jugez vous la situation de la France en matière de respect des droits de l'homme ?
Gérard Greneron : Ce serait mentir que d'affirmer qu'il n'y a jamais d'excès de la part de policiers et que rien n'arrive. Comme dans n'importe quel métier, la police a des personnels qui ne respectent pas la déontologie, mais elle est également composée de nombreux républicains. Les commissions de disciplines au sein desquelles siègent les syndicats n'hésitent pas à « couper des têtes », c'est-à-dire à aller jusqu'à l'exclusion de certaines personnes. Nous demandons, également, à pouvoir bénéficier totalement de la présomption d’innocence.
«Reproduit avec l’autorisation d’AISG (Agence d’Information Sécurité Globale, Groupe AEFC)»
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